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Conciliation : Les régions pauvres vont-elles être sacrifiées sur l’autel du financement du budget ?

ISIN : TN0009050014 - Ticker : PX1
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D'après la nouvelle loi de la conciliation pénale, soumise par le président kais Saied à l'Assemblée des Représentants du Peuple, votée par cette dernière le 16 janvier 2024 et promulguée deux jours plus tard, les délégations défavorisées pourraient devoir à l'avenir partager les 80% des recettes de la conciliation pénale avec des projets " d'importance nationale ".

Les quatre années écoulées depuis sa prise de fonction le 23 octobre 2019 comme président élu, démontrent que M. Kais Saied s'est donné deux missions. Politiquement, agir comme un bulldozer pour démanteler le système politique d'avant le 25 juillet 2021 –qu'il déteste- pour le remplacer par le sien propre. Economiquement et socialement, être en quelque sorte le Robin des Bois tunisien, qui, comme l'autre, prend aux riches –convaincus de corruption pour donner aux pauvres.

Le chef de l'Etat n'a eu de cesse de confirmer ce positionnement personnel et celui de l'Etat. Le 11 août 2023, il avait déclaré –en rendant visite à un élève à qui l'explosion d'une mine alors qu'il récoltait du Romarin dans le Jebel Mghila, entre Kasserine et Sidi Bouzid, un œil et une main- que "l'Etat avec tous ses organes doit lever l'injustice dont sont victimes les pauvres et les misérables, afin que le citoyen puisse vivre en sécurité (…)".

Pour atteindre cet objectif, le président Saied a mis en œuvre plusieurs moyens, dont le dispositif de la conciliation pénale. D'après, le décret y afférent du 20 mars 2022, ce mécanisme est destiné (article 1) à faire payer les personnes –physiques ou morales- ayant commis des " infractions économiques et financières, faits, actes et pratiques ayant entraîné des avantages illégaux ou illicites et produit un préjudice financier à l'État, aux collectivités locales, aux entreprises, établissements et organismes publics ou tout autre partie, et ce, en consécration du principe de la justice pénale réparatrice " et d'utiliser les fonds collectés pour financer des projets de développement.

Le décret précise les modalités de leur affectation. Une fois déposés sur un compte de fonds de participation au trésor de l'Etat -sous la dénomination " compte des ressources de la réconciliation pénale pour le financement des projets de développement ", ces fonds sont ventilées comme suit : 80% sont alloués aux délégations les plus pauvres, et les 20% iront aux collectivités locales " pour contribuer au capital des entreprises locales ou régionales prenant la forme de sociétés citoyennes, d'investissement ou commerciales conformément à la législation en vigueur ".

Qu'en est-il après l'amendement du décret du 20 mars 2022 par la loi numéro 3 de l'année 2024, votée le 16 janvier 2024 par l'Assemblée des Représentants du Peuple et promulguée deux jours plus tard ? En fait, ce schéma a changé.

Certes, il est encore question –d'après l'article 30 (nouveau)- de création d'un compte auprès du Trésor et d'une répartition 80%-20%. Sauf que les délégations défavorisées vont désormais devoir partager les 80% avec des projets " d'importance et d'intérêt national ".

La nouvelle loi indique qu'"il est possible qu'une partie (de ces 80%) pourrait être affecté au financement " de ces projets mais ne précise pas la part du " gâteau " de la conciliation pénale qui leur irait.

Ce qui veut dire que le mécanisme de la conciliation pénale pourrait à l'avenir servir –en partie, principalement ou totalement ?- à pallier les défaillances de l'Etat en matière d'investissements publics au cours des dernières années. La part de ces investissements dans le budget de l'Etat est en effet passée de 20% en 2010 à 6,7% en 2023.

Moncef MAHROUG

Publié le 30/01/24 14:22

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